New Me


Voilà quelques temps que je tombe sans arrêt malade. Tous les deux mois, je me prends des pics de fièvre à 39°, je tousse comme une tuberculeuse et ma voix ressemble à s’y méprendre à celle de (feue) Jeanne Moreau.
Comme j’en ai marre d’être toujours au bout de la roulette, j’ai fini par prendre RDV chez mon médecin traitant. Lui, je ne le vois qu’une fois par an, quand je vais quémander mon certificat médical pour le RUN IN LYON. Le reste du temps, je l’évite. Pas que je ne l’apprécie pas, simplement qu’au plus loin les médecins se trouvent de moi, au mieux je me porte.
Mais là, je sens bien que je n’ai plus le choix et que cela n’attendra pas octobre.

CHECK-UP
J’y vais et j’en sors avec une prise de sang et une liste longue comme le bras de trucs à analyser. L’idée de mon médecin, c’est de voir si je n’ai pas chopé la mononucléose récemment, ce expliquerait un système immunitaire affaibli… la maladie du baiser à 40 ans, ça me rajeunit de 28 : ça me va bien.
Le lendemain, a jeun comme jamais, je m’en vais au laboratoire. La dame pose un peu l’œil sur la liste longue comme le bras de l’ordonnance et moi, je suis à deux doigts de tourner du mien, quand je me vois vider de mon sang.
Deux jours plus tard, le vendredi soir, sinon c’est pas drôle, les résultats arrivent et le couperet tombe. J’ai les gamma GT (communément appelés « les trucs qui grimpent en flèche chez ceux qui picolent ») au bord de l’explosion, une glycémie bien trop haute pour quelqu’un qui n’avait pas plus d’un verre d’eau dans le bide au moment de la prise de sang et tout un tas d’autres machins soulignés et surlignés en gras qui semblent dire : « Alerte ! Alerte ! ».
Comme une conne, je fais comme tout le monde : je vais voir sur internet ce que tous ces termes signifient. Au 3e cancer, je décide d’appeler mon médecin (ou plutôt sa plateforme téléphonique) pour m’entendre dire qu’elle est en formation … en d’autres termes, pour en savoir plus sur mon état de santé, il me faudra attendre lundi matin. Ce qui est évidemment hors de question.
Sur les conseils de mes parents, j’appelle le laboratoire. Je tombe sur une nana rassurante qui me dit qu’elle n’y comprend pas grand-chose mais que, selon elle, il n’y a pas d’urgence vitale … me voilà bien pour attaquer mon week-end.
Celui-ci se passe, je survis. Le lundi suivant, toujours un peu inquiète et sans nouvelle de mon médecin, je décide d’aller voir une « naturo » que l’on m’a chaleureusement conseillée.
« Je ne sais pas si tu es ouverte à ce genre de choses mais ça peut vraiment t’aider ». Voilà comment les choses me sont présentées.
Dans la vraie vie, moi non plus, je ne sais pas si je suis tellement ouverte à ce genre de trucs. Ce que je sais en revanche, c’est que j’en ai plein le dos d’être au bout de ma vie toutes les 8 semaines et qu’il faut bien tenter quelque chose pour aller mieux. Alors, naturo, coupeuse de feu, vaudou, je m’en fous, tant qu’on me remet sur pied.

A NEW EXPERIENCE
Quelques jours plus tard, je me retrouve dans un cabinet du 5e arrondissement. Celui-ci n’a rien de tape à l’œil et rien de beatnik non plus. C’est un endroit tout simple mais qui m’enveloppe immédiatement tant il semble plein de bonnes ondes. Quand on me connait, on sait qu’il est presqu’impossible de m’entendre tenir de tels propos.
Cinq minutes plus tard, je suis dans le bureau de la naturo et les effets de la zen attitude se manifestent pour de bon: je lâche tout et je me mets à chialer comme une madeleine devant cette inconnue qui n’a même pas eu le temps de me poser 3 questions et d’obtenir 2 réponses. Pour me calmer, elle me conseille de tapoter juste au-dessus de la poitrine (ce sont des points d’acuponcture apparemment…). Elle joint ses gestes à la parole mais je dois mal tapoter ou pas au bon endroit, parce que ça ne marche pas : je ne me calme pas. Je pleure, je renifle et finalement, la fontaine tarie et je m’arrête. Elle reprend.
– Vous êtes fatiguée en ce moment ?
– Non ! (réponse machinale)… Enfin si, peut être un peu (réponse plus réfléchie). Enfin, je ne sais pas trop (réponse à la Claudine).
– Vous faites du sport ?
– Oui.
– Beaucoup ?
– Oui.
– Combien ?
Là, je donne une fourchette. Elle ne me parait pas folle cette fourchette, mais je sais qu’elle peut paraitre dingue pour certains et complètement ridicule pour d’autres… bref, il n’y a pas de règle. Pour la naturo, ça semble plutôt beaucoup.
– Pourquoi en faites-vous autant ?
– Pour me calmer (pardi !) et être à peu près agréable ensuite avec les gens qui m’entourent (et malgré cela, croyez-moi, ce n’est pas toujours évident).
– Vous faites donc cela pour tenter de dompter votre nervosité ?
– Parfaitement.
– Vous savez que c’est le chat qui se mord la queue, car plus vous en faites, plus vous avez besoin d’en faire pour vous sentir « calme ».
Oui, je sais. Mais si j’en fais autant, c’est aussi parce qu’il m’est plus facile de dire oui à une heure de sport que non à une part de gâteau au chocolat. Donc pour moi, les calculs sont vite faits. L’autre raison, c’est que je vieillis. Ça, c’est un fait avéré, je ne peux pas lutter contre, je ne peux rien y faire : c’est mort d’avance. En revanche, maitriser mon poids, ça, je peux. Alors j’essaie.

Après mes explications vaseuses, sans mot dire, elle me colle un casque sur la tête pour me faire passer un physioscan. Si j’ai bien compris, ce casque envoie des ondes à tout le corps et dresse une espèce de bilan de tout ton toi. Voilà certainement pourquoi, il faut être « ouvert » pour aller voir cette dame. Ce genre de truc doit être lunaire pour certains. Perso, je n’ai pas d’avis sur la question : je me laisse donc docilement faire.
Au fur et à mesure que les images défilent sur son ordinateur, ladite dame tord le nez. Au bout d’un moment, elle ose un :
– Euh, si… vous êtes fatiguée… mais vraiment fatiguée là. Et bien nerveuse aussi.
Ah oui ? Sans blague ?
J’ai toujours mon casque sur la tête. Elle poursuit :
– Et ne serait-ce pas possible de lever un peu le pied ?
– C’est-à-dire ?
– De faire du sport un jour sur deux par exemple ?
Là, je crois que je ne respire plus. Elle le voit à mes yeux tout ronds, tout livides. Elle n’insiste pas davantage et tente par une autre voie.
– Vous vous reposez des fois ?
– Ah oui ! Je dors bien.
– Dormir, ce n’est pas se reposer.
– Ah ?
– Non.
– Bah on fait quoi alors quand on se repose ?
– « Rien » justement. On s’adonne à des activités comme la peinture, le dessin. Vous dessinez, vous peignez ?
Je suis à deux doigts de lui faire un bonhomme mathématique pour qu’elle comprenne le ridicule de sa question. Comme mes yeux sont toujours tout ronds, désemparée, elle poursuit.
– Lire, écrire…
Ça y est, je respire de nouveau.
– Ah ! Oui, oui ! Ça, je fais un peu. J’aime bien.
– C’est bien.
Moi aussi je trouve ça bien, mais je trouve aussi que ça fait un peu léger pour s’occuper. Alors je demande :
– Mais sinon on fait quoi quand on se repose ? J’ai besoin d’exemples concrets pour me projeter et voir si ça peut marcher.
Oui, j’ai dit ça… Avec le recul, je me dis maintenant que cette femme a dû me prendre pour une folledingue. J’ai bien vu d’ailleurs que ça la déstabilisait un peu, alors j’ai repris :
– Par exemple, jouer au badminton avec mon fils, ça marche ?
– Oui, ça marche, si ce n’est pas contraint et forcé et que ça reste un plaisir.
– Ok, je vois le principe.
À ces mots, elle me demande :
– C’est quoi votre moteur ? Être forte, être aimée, être parfaite ou être libre ? J’ai ma petite idée, mais j’aimerais bien que vous vous prononciez
Oula ! Malheureuse ! je préfère que ce soit toi qui répondes car c’est LE genre de question auquel moi, je n’ai absolument pas de réponse!
Je tente quand même :
– Bah… je ne sais pas. Je ne vais pas dire « être libre » parce que des 4 propositions, c’est celle qui me semble « le moins ça ». Être aimée … oui, mais finalement moins que les 2 autres. Je vais répondre ce que dit mon amoureux à mon sujet, ce sera plus simple : être parfaite.
Apparemment, c’était la réponse qu’elle attendait car elle a acquiescé et m’a répondu du tac au tac :
– Et ça vous sert à quoi d’être parfaite ?
« Quête de la perfection : voie du bonheur ou route du malheur, vous avez deux heures ».
Comme je ne réponds pas, elle se tourne et s’empare d’un crayon Velleda. Sur son tableau blanc, elle dessine une croix. En ordonnée, elle inscrit Externe (en précisant : « ça c’est les autres, les facteurs extérieurs ») et Interne (« ça, c’est vous »). En abscisse, elle écrit : « Faire » et « Être », sans donner d’explication, pensant, à juste titre, que j’avais compris le truc.
Ensuite, elle dessine 3 croix au sommet du point de rencontre entre Externe et Faire en précisant : « Vous, vous êtes là ». Puis, elle trace une espèce de petit carré proche du centre de la croix, là où se rencontrent Interne et Être, et ajoute :
– Des fois, il serait bien que, vous alliez voir ce qu’il se passe un peu par là. Que vous vous écoutiez. Chose que vous ne faites pas beaucoup visiblement.
– Non, en effet.
– Et pourquoi ?
– Parce que si je m’écoute, je tombe.
Là, c’est elle qui ne respire plus. Elle me fait une tirade sur le besoin de me calmer un peu, parce qu’entre 30 et 40, ce rythme, ça passe mais qu’entre 40 et 50 c’est plus la même. Elle dit d’autres trucs qui font un peu peur je crois, et qui me font dire que oui, je vais essayer de me calmer. Elle me prescrit des Oméga 3 et des gélules savamment nommées MEGA STRESS (ils se sont pas fait chier pour trouver le nom mais bon, ça a le mérite d’être parlant) et je quitte son bureau.
Elle me raccompagne dans le hall, me salue courtoisement et retourne vite de là où elle vient. À bien des égards, cette femme me fait penser à une amie. Je pense que, comme elle c’est une éponge à émotions, et que ma rencontre l’a rincée. Elle doit avoir besoin d’une bonne séance de relaxation après cette heure passée en ma présence.

A NEW LIFE ?
Moi, je sors de là apaisée. Je ne me dis pas que j’ai une heure pour arriver à l’école et qu’en courant comme une dératée, je suis large pour faire le trajet à pied. Non, je ne fais pas ça. Je prends un bus (comme tout le monde). En m’asseyant, pour une fois, je ne sors pas mon téléphone de mon sac pour regarder n’importe quoi (pas comme tout le monde) et j’observe ceux qui m’entourent. Mon regard tombe sur un petit dans une poussette, qui ne fait rien qu’à faire tomber sa sucette. Et comme il la remet mal à chaque fois, il use de cette merveilleuse technique connue de tous les parents : il la repositionne parfaitement d’un petit coup de langue Ça m’a toujours fait rire de voir les enfants faire ça. Quand mon fils avait une sucette, je faisais exprès de lui mettre n’importe comment dans la bouche pour qu’il le fasse. Ça a dû le saouler parce qu’après 3 semaines de ce jeu incessant, il n’a plus voulu de sucette (si ça peut aider les mamans qui cherchent à sevrer leur tout petit de ce truc en plastique…).
Bref, tout ça pour dire que, depuis, j’essaye de lever le pied. Je suis en apprentissage, mais je ne m’en sors pas si mal pour le moment, si on oublie le fait que j’ai commencé à rédiger cet article dans ma tête, alors que je parcourais mes 10 km à pied… le surlendemain de ma rencontre avec la naturo.

Claudine

Dem facerum ipit lacil ius millict orerum aspitas conet excerspient odi quae exceperibus moles dicipiciam aut hitat !

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