Mes pépites

Mes pépites


Vous ne m’enlèverez pas de l’idée qu’on ne devient pas prof par hasard. Oui, bien sûr, il y a la vocation, la volonté de transmettre aux générations futures, le besoin de se rendre utile, blablabla… Personnellement, je pense qu’il y a autre chose. Une motivation bien plus ancrée que l’envie d’occuper la position du donneur de leçon toute la sainte journée. Bien plus forte que le désir de finir à 17 h tous les jours. Bien plus intense que la douce perspective de bénéficier de 6 mois de vacances par an. Non, vraiment, je pense qu’on devient prof, aussi parce qu’on sait qu’on va passer un paquet de temps à se fendre la tronche à écouter toutes les inepties que ces chers élèves vont réussir à débiter en 40 ans de carrière. Je suis sûre que certains vendraient leur mère pour assister en première loge à un tel divertissement!

 

ELLE EST OÙ LA CAMÉRA ?
Il y a les anecdotes qui font sourire. Comme la fois où l’une de mes amies du Charlestown (oui, encore elle), nous racontait comment ses 5e s’ébahissaient de voir de si petits arbres alors qu’ils se trouvaient devant des pieds de vignes. Il y a celles qui font bien rire. Comme celle racontée par ma petite voisine, qui alors qu’elle dictait le mot « sortable » à ces CE2, a vu le regard interrogateur d’une de ses élèves, immédiatement rassurée par son puits de science de petit camarade, qui lui certifiait que « sortable » signifiait : « Sors de table ». Et puis il y a celles qui font bondir. Comme cette fois-ci, où je me trouvais en surveillance à la fac, pour dépanner un copain qui, pendant ce temps-là, se dorait la pilule dans le sultanat d’Oman. Ce jour-là donc, je passais les portes d’un amphi vétuste pour surveiller un partiel d’Histoire Politique et Institutionnelle de première année de droit. On m’avait dit de bien faire attention : les filous redoubleraient certainement de malice pour tricher. Ainsi, il fallait se montrer extrêmement vigilants car visiblement, l’ère n’était plus aux anti-sèches collées sur le double décimètre ou écrites sur les trousses. Prenant ma mission très au sérieux, je me suis mise en poste et en quête de ces tricheries version nouvelle génération. Par deux fois, j’ai vu deux étudiants assis tout en haut de l’amphi, qui ne semblaient pas « gratter » beaucoup mais plutôt bien discuter… Hors de question qu’il y ait « pompe » durant ma surveillance ! Je suis donc montée ni une, ni deux, sur les marches les plus élevées pour observer tout ça. Si ma présence a fait cesser leurs murmures, elle ne les a pas incités à écrire plus. Ainsi, une fois l’heure réglementaire passée, les deux sont descendus pour déposer leurs travaux sur notre bureau. Forcément intriguée, je suis redescendue de mon perchoir pour jeter un œil aux copies. Autant dire que je n’ai pas été déçue du voyage. À la première question : « Qu’est-ce que la cohabitation ? », l’un des deux avocats en herbe a répondu, je cite : « Les cohabitations sont des habitations où crèches plusieurs individus » (Rappel du contexte : partiel de 1ère année de droit… Et non, je n’ai pas fait de faute en recopiant le verbe « crécher »). Mais ce n’est pas tout. À la deuxième question qui interrogeait sur la nature des effets de je ne sais plus quelle loi, le même individu a trouvé opportun de répondu « Bien ». C’est tout. « Bien ». Un mot. C’est parfait … Alors, bien évidemment, j’ai interrogé ma co-surveillante, plus habituée à l’exercice que moi. Elle m’a répondu avec une mine dépitée que ces deux étudiants étaient boursiers. Et que pour continuer de toucher leur bourse, ils devaient au moins se présenter à l’examen. J’ai senti la moutarde me monter au nez. J’ai crié au scandale et à l’injustice. J’ai vociféré comme une pie. Comment ça, on leur octroyait une bourse alors que d’autres plus méritants se farcissaient de servir des frites au Mac do tous les week-end pour financer leurs études ? Comment ça personne ne s’indignait de les voir voler la bourse d’un autre ? Et pourquoi ne prenait-on pas en considération d’autres critères que les sociaux ? J’ai gueulé comme un putois. La pauvre jeune fille n’a pas du bien comprendre pourquoi je me mettais dans des états pareils. Et s’est contentée de hausser les épaules et de me dire : « C’est ainsi, c’est la vie». Ah bon.

 

MIEUX VAUT EN RIRE …
Dans un autre genre tout aussi énervant, j’ai aussi affaire à de jeunes gens, financièrement plus à l’aise, mais pas forcément plus fins. Ainsi, me suis-je retrouvée la semaine dernière, à intervenir devant un groupe d’étudiants d’une vingtaine d’années. Je vous passe ceux qui sont arrivés en retard et ceux qui ne se sont d’ailleurs même pas présentés. Je vous passe ceux qui se sont logés en fond de classe pour pouvoir jouer à candy crush ou je ne sais quelle autre truc durant le cours. Je vous passe ceux qui, pensant ne rien avoir à apprendre de personne, ont préféré poursuivre tranquillement leur discussion (bien que visiblement légèrement gênés par le fond sonore de mon intervention). Je vous passe ceux qui avaient un énergie semblable à celle d’un mollusque en fin de vie. Mais je ne vous passerai pas celui qui est arrivé avec 20 minutes de retard et qui empestait l’alcool. Ni celui qui au bout d’1H30 de cours a fini par lever la main pour me dire : « On a bientôt fini ? J’ai entrainement… ». Donc, celui qui avait grossièrement cherché à m’amadouer à l’entrée du cours, me disant avec sa casquette vissée sur la tête qu’il pensait que je faisais partie du groupe d’étudiants (mais oui, bien-sûr !) me demandait maintenant de bien vouloir la boucler rapidement pour qu’il puisse aller taper dans son ballon et éviter les embouteillages du vendredi soir.

Oui, parce qu’il faut savoir que les embouteillages sont la bête noire des étudiants de 20 ans. C’est bien plus problématique pour eux que pour toi qui dois aussi traverser Lyon pour récupérer ton Rat à la garderie. Mais toi, tu prends le métro donc tu ne sais pas ce que c’est que de devoir traverser le tunnel de Fourvière un vendredi à 17h ! J’en suis restée comme deux ronds de flans. Et lui, il est resté en cours. Jusqu’à la fin.

 

Voilà 3 ans que j’interviens dans des écoles. 3 ans que cette fonction semble chercher à mettre ma patience à rude épreuve et mes nerfs à vif. Moi, qui petite rêvais d’être prof… Grand bien m’a fait de changer de vocation. Il ne m’aurait pas fallu bien longtemps pour baffer celui ou celle qui aurait eu le malheur de me dire dans un demi sourire sarcastique que j’exerçais « le plus beau métier du monde »…

Claudine

Dem facerum ipit lacil ius millict orerum aspitas conet excerspient odi quae exceperibus moles dicipiciam aut hitat !

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