En attendant Bojangles

En attendant Bojangles


Je l’avais vu des dizaines de fois dans la vitrine de la librairie Renaud Bray, boulevard Saint Laurent. Sa couverture lumineuse et étoilée attirait chaque fois mon attention. De retour à Lyon, alors que je cherchais le livre qui allait occuper mes prochains trajets en métro, j’ai eu un moment de nostalgie en le retrouvant dans les rayons de la FNAC. J’ai jeté mon dévolu sur ce livre, sans rien savoir ni de l’auteur, ni de l’histoire. J’ai bien fait : coup de cœur immédiat et absolu.

 

Le livre qui pétille.

Dès les premières lignes, j’étais conquise. Ce livre est d’une imagination dingue, d’une poésie folle, d’une naïveté bouleversante, d’un humour émouvant, d’un amour déconcertant. Ce livre, c’est 171 pages loufoques, voire complètement absurdes. Tout ou presque est improbable. Et pourtant l’on se projette aisément dans cette histoire aberrante. On adopte très vite ce père fantasque, ancien chasseur de mouche au harpon qui ment comme il respire. On adore qu’il affuble son épouse d’un prénom différent chaque jour. On s’attendrit devant cette mère qui choisit une grue ramenée d’Afrique comme animal domestique. On a le cœur qui se serre quand elle picore d’amour son enfant et préfère brûler photos et souvenirs au sein même de leur appartement plutôt que de voir les impôts s’en saisir. On comprend cet homme follement amoureux qui accepte de suivre sa moitié dans toutes ses folies et se questionne chaque jour sur ce qu’il va pouvoir faire de cet amour fou. On aime l’histoire à deux voix, portée par le père et le jeune fils unique. On admet facilement que ce dernier ne comprenne pas comment les autres enfants font pour vire sans ses parents. On les imagine parfaitement mener cette vie de château en Espagne, où l’on se nourrit de danse, d’amandes grillées et de cocktails surmontés d’une olive.

L’ambiance se plombe subtilement au fil des pages. On sent l’inéluctable poindre le bout de son nez. On craint que la chute soit aussi violente que l’histoire est pétillante. Ce serait sans compter sur le talent et la maîtrise de l’écrivain. Ainsi, nouvelle surprise : la simplicité du récit, la douceur du dénouement, la sagesse de l’enfant face aux événements sont un dernier flot où se mêlent une multitude d’émotions. On ferme alors l’ouvrage avec regret et le sentiment que ce livre est une véritable pépite.

 

Olivier Bourdeaut, qui es-tu ?

Olivier Bourdeaut ressemble à un homme comme les autres, ce qui rend son parcours et son succès fulgurant encore plus extraordinaires. Inconnu au bataillon avant que ce premier roman ne fasse un véritable tabac, il peut aujourd’hui se vanter de permettre à Google de trouver 233 000 résultats citant son nom, en exactement 0,57secondes. Faites le test en inscrivant le vôtre entre guillemets dans la barre du célèbre moteur de recherche. À moins que vous ne vous appeliez Pierre Dupont (auquel cas vous obtiendrez la gloire des 336 000 résultats en un temps record), il y a fort à parier que vous n’égaliez jamais le romancier et que seuls les réseaux sociaux ou autres annuaires daignent parler de vous!

Bref, parmi les milliers de résultats, on apprend d’Olivier Bourdeaut qu’il est né à Nantes, qu’il est issue d’un fratrie de cinq et que c’est un véritable cancre à l’école au point d’échouer au brevet des collèges. Ce gaucher partiellement sourd et dyslexique, finit par se faire virer de l’école et entame rapidement ce qu’il appelle le « deuil scolaire ». Récolteur de fleur de sel de Guérande, ouvreur de robinets dans un hôpital, piteux agent immobilier, Olivier Bourdeaut enchaine les boulots et les expériences surprenantes. Il écrit même pendant deux ans, un premier roman noir et cynique qui ne trouvera aucun éditeur. Il faudra donc attendre qu’il atteigne ses 35 printemps pour voir la roue tourner et son destin d’incorrigible loser prendre un sérieux coup.

 

Le tournis

Dès lors, les choses vont très vite. L’histoire raconte qu’il a écrit « En attendant Bojangles » en 7 semaines, qu’il n’a pas fallu 4 jours aux Éditions Finitude pour rappeler l’écrivain prodige et que l’oeuvre a été acheté par 6 pays avant même sa sortie. Ainsi tiré initialement à 10 000 exemplaires, le roman atteindra les 200 000 lorsqu’il paraîtra en format poche. 13 pays s’arracheront les droits, 10 prix littéraires le sélectionneront et 3 d’entre eux en feront leur lauréat. De quoi donner le tournis. Quand on apprend dans une interview donnée à Babelio, que tout son livre est né de cet avant propos « Ceci est mon histoire vraie avec des mensonges à l’endroit, à l’envers… », on se dit que parfois quelques mots peuvent véritablement changer une vie.

 

Dans la peau d’Olivier Bourdeaut

Deux ans, entre mille autres choses, nous séparent. La passion de l’écriture et un père notaire nous réunissent. Le même complexe nous habite : « Presque tous les livres que je lis me donnent des complexes. J’ai toujours des moments d’accablement en lisant certains auteurs, un accablement admiratif ».

Moi, si j’avais Olivier Bourdeaut en face de moi, je lui demanderais : ça fait quoi de voir son nom et son roman dans les rayons de la FNAC, comme ça, du jour au lendemain ? Ça fait quoi de voir des gens lire son livre dans le métro, sur la plage ? Ça fait quoi de recevoir un appel de la rédaction du Figaro pour donner une interview ? Dis-moi, Olivier, ça fait quoi de de vivre ce rêve?

Claudine

Dem facerum ipit lacil ius millict orerum aspitas conet excerspient odi quae exceperibus moles dicipiciam aut hitat !

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